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04.09.2020 Entre crainte et admiration
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Lukas Eugster et sa Ligier JS53

La REVUE AUTOMOBILE a fait sensation ces dernières semaines avec sa série «Racing Car Portrait». Chez Auto Sport Suisse, nous sommes fiers de pouvoir publier les œuvres des deux auteurs Werner Haller et Olivier Derard. Partie 11: La Ligier JS52 de Lukas Eugster.

La première apparition publique de Lukas Eugster au volant de sa Ligier sport-prototype avait impressionné tous ses concurrents, même les plus capés. «Il va falloir le tenir à l’oeil», déclarait l’actuel septuple Champion de Suisse de Slalom, Martin Bürki, fin mars 2019, lors des tests de présaison à Ambri, dans le Tessin. Une semaine plus tard, dès le lever de rideau à Interlaken, Eugster confirmait ces éloges anticipés. Lors de la première manche, le pilote de Suisse orientale fut, derrière Philip Egli, le seul à passer sous la barre de 1’31’’.

Lukas Eugster n’aurait jamais osé imaginer un départ aussi fulminant car, à l’issue de la saison 2018, le mécanicien de profession était à deux doigts de faire une croix sur sa carrière de pilote de course. Malgré le titre de vice-champion au championnat national Juniors de la Montagne en 2017 (avec une Toyota GT86) et des succès d’estime, l’année suivante, en championnat des Slaloms (Formule Renault 2.0), ses perspectives de carrière n’étaient pas très réjouissantes. «Les voitures de Formule 3 ou de Formule Master étaient tout simplement devenue obsolètes.» Mais Hanspeter Bischofberger, rival et néanmoins proche d’Eugster, a eu une idée: il a contacté Christoph Schumacher, dont l’entreprise, Caron Fahrzeugtechnik AG, s’apprêtait à célébrer son 25e anniversaire. Avec le bon sponsor en poche, il s’est rendu chez Horag Hotz Racing AG. «Vous savez, dans la Vallée du Rhin, tout le monde connaît tout le monde», explique Eugster dans un éclat de rire.

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Trop large et trop lourd? Pas pour Luke Eugster © Kaufmann

Il est resté bouche bée en découvrant la caverne d’Ali Baba de cette manufacture de voitures de course: «Je suis instantanément tombé amoureux de cette sport-prototype, la Ligier JS53. Il suffit de se pencher sur les amortisseurs horizontaux. Tout simplement magnifique! Ce que confirme quiconque s’intéresse à la technique.» Les premiers véhicules extraordinaires du Français décédé en 2015 ont été la JS2, une voiture de sport qui a décroché une sensationnelle deuxième place aux 24 Heures du Mans en 1975. L’abréviation JS qui figure sur toutes ses voitures est un hommage à son ami intime Jo Schlesser, le pilote de course français décédé en 1968. «Au moment de me glisser dans le cockpit de ma Ligier lors de son premier essai privé sur l’Anneau du Rhin, j’étais presque paralysé d’admiration et de crainte», se rappelle Lukas Eugster. Mais quelques tours de piste ont suffi pour que sa réserve se transforme en une joie sans bornes: «Quelle voiture de course, ne cessais-je de me répéter. Dans les rapides lignes droites, j’ai hurlé d’enthousiasme dans mon casque.»

Le retour de bâton ne s’est pas fait attendre. Le lendemain, «j’avais mal au cou, je ne pouvais pratiquement plus le bouger», se rappelle Eugster. Le tribut impitoyable des G. «Je ne m’attendais pas à une telle sollicitation, d’autant moins que la JS53 est la Ligier d’entrée de gamme.» Mais, en bon fan de fitness, l’actuel trentenaire n’a pas eu de mal à s’adapter à la sport-prototype. «La Ligier est beaucoup plus vive qu’une Formule Renault. Ces voitures de sport ont un fond plat si grand qu’elles génèrent un énorme appui à basse vitesse. Et plus tu vas vite, plus la voiture est stable.» C’est avec un tel dispositif sur sa monoplace de formule 1 Brawn que Jenson Button a jadis dominé la formule 1 en 2009 et est devenu Champion du Monde. Eugster est enthousiaste: «Elle a un air brutal dès que l’on enlève le capot arrière! On m’a dit qu’elle génère approximativement autant d’appui qu’une monoplace de formule 1 du début des années 2000.»

«Avec cette voiture, tu ne seras jamais parmi les meilleurs en slalom. La Ligier est trop lourde et trop large, disaient-ils»: les remarques sceptiques de ses condisciples, Eugster ne tardera pas à les faire mentir; à la fin de la saison, le binôme Eugster-Ligier avait décroché pas moins de cinq deuxièmes places au général en slalom! Au début, Eugster et son équipe étaient, eux aussi, sceptiques: «Nous nous demandions si nous serions capables de bien régler cette voiture.» Des doutes qui se sont entretemps dissipés. Toujours est-il que l’aileron arrière n’est plus le même qu’en 2019: «Il est plus près de l’auto, en l’occurrence plus bas et plus rapproché du cockpit. Et, autre nouveauté, il a aussi d’ailettes latérales de plus grandes dimensions.» La combinaison roue-pneu, aussi, s’est élargie. «Nous avons modifié pas mal de choses sur la voiture – tout n’est pas visible.» Comme le moteur: «C’est toujours un propulseur Honda», confirme Eugster avec un sourire goguenard.

Il n’est pas le seul à être curieux des performances de sa Ligier JS53 améliorée, tout le petit monde du Slalom est impatient de le voir à l’oeuvre. Ce sera à la mi-octobre, à Ambri toujours.

LIGIER JS53
Année de production: 2015
Carrosserie: Sport Prototype
L x l x h mm: 4620 × 1800 × 1100
Empattement mm: 2650
Poids en ordre de marche kg: 550
Moteur (construction): Honda K20A, 4-cylindres en ligne, 2000 cm3
Puissance ch: 250+
0-100 km/h sec: N.C.
Vitesse maximale km/h: 280 (dépendant du rapport de T.)
Châssis & trains roulants: Koni Push Rod, deux amortisseurs horizontaux avant et arrière

RA #30/31, 23 juillet 2020, auteur: Werner J. Haller, www.revueautomobile.ch

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