Le Grand Prix d'Erlen a été disputé à quatre reprises entre 1948 et 1951 et cela sur un circuit qui ne comportait en réalité que trois virages. Auto Sport Suisse est parti à la recherche de ses traces.
C'est à peine croyable, et pourtant c'est vrai: celui qui roule aujourd'hui sur la route principale 14 de Romanshorn à Frauenfeld se trouve, peu après avoir passé le club de golf d'Erlen, sur un ancien circuit de Grand Prix. Le départ et l'arrivée se trouvaient à l'endroit où se situe aujourd'hui l'école Erlen. Dans le sens de la marche, à gauche, se trouvait la tribune principale couverte. Les représentants de la presse prenaient place sur le côté opposé. Une simple clôture en bois faisait office de «protection». On n'ose imaginer ce qui serait arrivé si une voiture ou une moto s'était échappée vers la gauche ou vers la droite sur la chaussée alors très accidentée...
S'agissait-il d'une piste pour voitures ou motos? Question justifiée, car la course était ouverte aux véhicules à deux et quatre roues. En 1948 et 1949, on se limitait à un statut national. En 1950 et 1951, on invita également des concurrents internationaux. Derrière ce projet ambitieux se trouvait le l'association des courses sur circuit d’Erlen, fondée spécialement pour cette manifestation. La souveraineté sportive était assurée par l'ACS Thurgovie (pour les automobiles) et l'Association des motards de Suisse orientale (pour les motos).
Le premier «Grand Prix de Suisse orientale» a eu lieu le 8 août 1948. Les spectateurs n’ont pas été très nombreux, notamment en raison du mauvais temps, ce qui a creusé un trou considérable dans la caisse de l'association. Sur le plan sportif, un homme a pris le dessus: Toulo de Graffenried. Ce Fribourgeois a été relégué en queue de peloton peu après le départ à la suite d’une crevaison, mais il s'est battu pour revenir en tête et a remporté le Grand Prix de Thurgovie après 50 tours (= 139,25 km) sur sa Maserati 4CL.
La vitesse moyenne de Graffenried était alors de 102 km/h, ce qui était une bonne vitesse; même s’il s'agissait la plupart du temps d'une ligne droite. En effet, le tracé rappelle un tri-ovale. La ligne droite de départ/arrivée était longue de 1,2 kilomètre. A la fin, les véhicules tournaient à droite dans la Bahnhofstrasse, à la hauteur de la boucherie qui n'existe plus de nos jours. Ce virage était appelé le virage Riedt.
Sur le chemin de la gare, à l’endroit où se trouve aujourd'hui un magasin de pneus discount, il y avait un petit virage à droite juste avant la tribune Wacker. Celui-ci était plein et conduisait les véhicules le long de la gare, sous un viaduc, vers le deuxième virage. A cet endroit se trouvent encore aujourd'hui des bâtiments de l'époque. Le «Statiönli» par exemple ou l'ancien hangar de la gare en face de l'actuelle succursale de Lista à la Fabrikstrasse 1.
Le virage 2 débouche encore aujourd'hui sur la Poststrasse. C'est là que se trouvait la « tribune du virage en S ». Mais ce virage à gauche ne ralentissait pas vraiment les voitures. Les véhicules fonçaient devant des jardins sur la Poststrasse en direction du virage Kradolfer et donc de la rue principale. Le trio-val était alors bouclé.
Comme le parcours n'était pas très sélectif, mais que les différences entre les véhicules étaient énormes dans les années 1950, le suspense des courses qui se sont déroulées en Thurgovie de 1948 à 1951 était limité. La course la plus passionnante fut sans doute la dernière. En 1951, six constructeurs différents prenaient alors le départ dans la catégorie reine, la Formule 2. Outre HWM, Gordini, Veritas, AFM et OSCA, deux Ferrari d'usine étaient également au départ. L'une d'entre elles, pilotée par l'Anglais Peter Whitehead, a remporté la course devant le Schaffhousois Rudolf Fischer, qui conduisait également une Ferrari. Stirling Moss, qui avait décroché la pole position, a abandonné avant la mi-course au volant de sa HWM.
Diverses courses de voitures de sport ont également eu lieu à Erlen dans le cadre du programme-cadre. Toujours en tête: le Zurichois Willy Peter Daetwyler qui, sur sa Alfa Romeo 412 de grosse cylindrée, établit en 1951 le record du tour non officiel de 1:22,2 min (= 121,970 km/h) lors des essais et triompha également en 1951 sur le trio-val thurgovien, après sa victoire en 1950.
Pour des raisons budgétaires, on renonça à une 5e édition du «Grand Prix de Suisse orientale» en 1952. Lorsqu'il fut question d'une nouvelle édition en 1953, on a dû y renoncer pour des raisons de sécurité. Il aurait fallu moderniser le circuit, mais les moyens financiers requis manquaient. L'association s'est donc dissoute en 1954. Mais il nous reste les photos de l'époque. Auto Sport Suisse a pu en obtenir quelques-unes grâce aux archives de l'ancien pilote de Frauenfeld Hans Schuler (cf. également Facebook). Elles sont non seulement la preuve que le sport automobile en Suisse a une longue tradition, mais permettent également de se souvenir avec nostalgie des endroits où il serait aujourd'hui inimaginable d'organiser des courses automobiles!